Dark Souls

Dark Souls – Le jeu qui « souffre » le chaud et le froid

S’il est un jeu qui a relancé la vente des dictionnaires de superlatifs, c’est bien Dark Souls. A sa sortie sur console, puis suite à son adaptation sur PC, les sites de tests et les magazines spécialisés se sont extasiés sur sa difficulté, faisant de ce titre action-rpg, une sorte de rite de passage obligé pour tous ceux qui voudraient se targuer du titre de « joueur pur et dur » (hardcore gamer quoi…). En somme, si tu n’aimes pas souffrir sur Dark Souls, c’est que tu n’es pas un vrai joueur et que tu peux retourner à ta partie de Candicruchessaga.

Son succès a eu le mérite de montrer qu’il existe un marché pour des jeux représentant un certain challenge. Mais une difficulté relevée ne fait pas un bon jeu et, heureusement, le rejeton développé par From Software et édité par Namco Bandai, est bien plus que ça. Dark Souls est un jeu d’ambiance où la solitude sera votre compagnon le plus fidèle, tant chaque rencontre peut se révéler fatale.

Retour au source

DS04Au départ, il y a eu Demon’s Souls. Uniquement paru sur PS3 en 2009, il a posé les bases de ce qui serait bientôt une série encensée, déclinée sur console et PC. Dès ce premier titre les bases étaient posées : un univers fantasy très sombre, des combats en temps réel exigeants, une mort punitive, une progression du personnage liée à la récolte des âmes des ennemis vaincus. A quelques subtilités près, Dark Souls reprend les mêmes systèmes dans un monde plus ouvert.

Le joueur y débute son aventure dans le corps putréfié d’un cadavre ramené à une pseudo vie. Vous devrez arpenter un monde totalement inconnu composé de villages, de châteaux, de forêts ou encore cimetières et de mondes sous-terrains désolés. Aucune indication ne vous sera donnée et il faudra découvrir par vous même cet univers et savoir comment sauver votre âme.

DS05Au-delà du scénario plutôt obscur, les développeurs sont parvenus à insuffler une vraie ambiance à Dark Souls. Le joueur est envahi d’un sentiment de solitude rehaussé par de rares notes de musique et des bruitages savamment dosés. Les rencontres avec les quelques personnages non belliqueux renforcent cette impression tant ils semblent désincarnés telles des âmes errantes et égarées. Les teintes principalement grisâtres et délavées participent de cette identité bien spécifique parfois à la limite de la mélancolie.

Simulation de baston mortelle à tendance médiévale fantastique

La création du personnage est assez anecdotique. Selon l’orientation choisie, il disposera de certains atouts dont l’intérêt sera très vite estompé au fil de l’évolution des compétences. En effet, les voies de progressions sont totalement ouvertes. Il est tout à fait possible de débuter avec un magicien et de le faire évoluer en un guerrier adepte de l’épée à deux mains. Tout est fonction des compétences que le joueur choisira de privilégier.
L’équipement revêt une grande importance et influence grandement la manière de jouer. Les pièces d’armures, par exemple, peuvent être portée par toutes les classes de personnages à condition de disposer des caractéristiques minimum requises. Selon leur encombrement, votre personnage sera éventuellement mieux protégé mais souvent au prix d’une mobilité réduite. Vos déplacements seront alors ralentis et vos mouvements d’esquives bien plus patauds.

DS02Les armes suivent cette même logique. Une lourde claymore fera certes de gros dégâts et aura une portée plus longue qu’une simple épée mais aura également une grande inertie rendant vos mouvements beaucoup plus lents, vous exposant aux contres de vos adversaires. Mais cela ne s’arrête pas là. La même arme n’aura pas la même efficacité selon le profil du personnage. Certaines seront plus meurtrières entre les mains d’un personnage avec une dextérité élevée pendant que d’autres exigeront une force accrue pour donner leur pleine mesure.

Au même titre que la gestion de l’équipement, les combats en temps réel demandent une vraie discipline et se rapprocheraient presque d’une simulation tant les paramètres à intégrer sont pointus. Vous ne combattrez pas de la même manière un gugusse armé d’une lance et un autre brandissant une hachette. Allonge de l’arme, types de dégats, vitesse de maniement, encombrement… tout cela influencera l’issue de la bagarre. Essayez de faire des moulinets dans un couloir étroit avec une énorme épée à deux mains… vous allez rayer les murs avant de vous faire égorger par votre ennemi muni d’une petite dague bien plus adaptée à cet environnement.

Il faudra également avoir l’œil sur votre jauge d’endurance. N’espérez pas bondir comme un cabri au milieu de la mêlée en distribuant des coups mortels avec votre cimeterre. Vous n’êtes pas Legolas. Chaque action – coup porté plus ou moins fort, esquive, course, coup paré – pompera votre énergie. Et si vous vous retrouvez à bout de souffle, ben… le « jeu fini » (gaimehoveure pour les ricains) n’est pas très loin.

Punitif mais motivant

Ce système, exigeant diront certains, vicieux se lamenteront les esprits chagrins, est finalement très gratifiant. Si vous perdez une confrontation, c’est de votre faute. Vous vous êtes sûrement mal préparé, vous vous êtes certainement mal équipé, vous avez peut-être mal évalué la puissance de votre vis à vis, vous n’avez probablement pas choisi l’endroit le plus propice… bref vous avez merdé quelque part et ce n’est pas la peine d’accuser le jeu. Au contraire, chaque victoire, vous ne la devez qu’à vous et à votre capacité d’adaptation.

DS06Cet apprentissage par l’échec pourrait être décourageant, mais au contraire, il se révèle étonnamment motivant. Chaque rouste fera progresser votre technique, vous rendra plus prudent et plus malin. Dark Souls est un jeu pour les joueurs patients et minutieux. Les autres n’y trouveront qu’agacement et découragement. D’ailleurs, à chaque première rencontre avec un boss, vous décéderez… Et c’est normal car ils sont tous plus forts, plus rapides, plus grands et plus beaux que vous. Mais après deux ou trois morts par éviscération, vous découvrez leurs points faibles et adapterez vos actions et votre équipement pour les trucider enfin. Et là,  une sensation d’accomplissement et une juste fierté s’empareront de votre esprit. Vous décrirez votre exploit à vos proches, qui n’en n’auront rien à cirer mais qui ne vous le diront pas parce qu’ils vous aiment bien (même si vous laissez traîner vos vêtements sales au lieu de les mettre dans le panier à linge).

Pour faire évoluer votre personnage, rien de plus simple : il suffit de vaincre des adversaires qui, une fois occis, lâcheront quelques âmes. Ces âmes servent aussi bien à développer ses compétences qu’à acheter des armes, armures et autres équipements. Bien entendu, plus la compétence sera élevée, plus le nombre d’âmes nécessaire sera grand pour franchir le palier suivant. Mais attention, les âmes chèrement gagnées peuvent s’envoler à tout moment. Un combat perdu, un plongeon dans un précipice, un éboulement sur la figure… et le compteur retombe à zéro. Votre personnage réapparaitra au dernier feu de camp activé. Seule chance de récupérer vos âmes : retourner à l’endroit du décès où votre butin vous attend. Mais entretemps, tous les adversaires précédemment vaincus auront réapparu et il vous faudra à nouveau les combattre, et si vous mourrez encore, vos âmes disparaitront définitivement. Oui, c’est vicieux… d’autant plus que le jeu est sauvegardé en temps réel, chaque sauvegarde écrasant la précédente rendant le moindre faux pas irréversible.

Tout n’est pas rose dans cet univers grisâtre

DS03Dark Souls propose aussi des options multijoueurs. Il est tout d’abord possible de laisser des messages au sol pour avertir les autres aventuriers d’un danger potentiel, indiquer un lieu ou un  personnage intéressant. Cette fonctionnalité se révèle à l’usage être une fausse bonne idée car la majorité des messages n’apporte aucune information digne d’intérêt si ce n’est les passionnants états d’âme de quelques joueurs esseulés. Vous pouvez aussi toucher les flaques de sang laissées par les autres joueurs trépassés, vous assisterez alors à ses dernières secondes de vie, vous permettant d’anticiper un éventuel piège ou un ennemi retors. Il est également possible d’envahir la partie d’un joueur, soit pour lui prêter main forte, soit pour la lui mettre dans la figure (votre main). Ce dernier aspect pourra déplaire car il peut être agaçant de voir sa partie interrompue par l’irruption d’un autre aventurier décidé à vous zigouiller… comme si vous n’aviez pas assez de boulot avec les ennemis virtuels du jeu.

Dark Souls est donc jeu qui pourrait mériter votre attention, votre temps, votre sueur et vos larmes si son adaptation sur PC n’avait pas tourné au massacre. Devant l’insistance des joueurs à voir le titre porté sur ordinateur, Namco Bandai semble avoir flairé le filon et a livré une version bâclée rebaptisée Prepare To Die Edition. Résolutions aussi basses que la côte de popularité de notre Président de la République,  fluidité… pas fluide, jouabilité à la souris… pas vraiment jouable. Un authentique gâchis en partie compensé par les mods produits par la communauté. Dans la version de base, les personnages et les décors sont flous. Le moteur physique n’a pas été amélioré ce qui entraîne de nombreuses scènes ridicules où votre personnage traine pendant plusieurs mètres les cadavres de ses adversaires comme s’ils s’étaient emmêlés dans ses jambes.

Ces errements difficilement pardonnables gâchent une bonne partie du plaisir du joueur tant ils peuvent nuire à son immersion et empêchent Dark Soul d’atteindre l’excellence ludique.

Petite précision sur les illustrations qui sont des images issues du site officiel, le rédacteur de ce test ayant coupablement négligé de faire ses propres captures pendant sa partie (NDR – je sais, c’est pas pro…)

Dark Souls Prepare To Die Edition / From Software – Namco Bandai / 2012 pour la version PC

NOTES


 

Graphismes et sons : 2/5
Quel dommage que l’adaptation PC ait été bâclée avec des résolutions indignes même des vieux PC. Dommage car les décors et les ennemis, parfois très réussis, méritaient un meilleur traitement. Les sons et musiques sont discrets et efficaces.
Interface de combat : 4/5
C’est la grande réussite de Dark Souls. Tout le sel du jeu réside dans ses combats très exigeants et gratifiants pour les joueurs tenaces.
Scénario : 3/5
L’histoire est très en retrait et propose peu de rebondissement. Heureusement, l’ambiance de Dark Souls est très réussie grâce à des choix artistiques opportuns.
Jouabilité (fun) : 2,5/5
Cette version PC souffle la glace et la braise : d’un côté une mécanique de jeu et une ambiance formidables, de l’autre une technique défaillante et frustrante. Cependant, si vous faîtes abstraction de ce dernier aspect et si vous adhérez à l’orientation action / simulation de combat du jeu, vous pouvez facilement ajouter un ou deux points à la note.