Realms of Arkania Blade of Destiny HD

Il existe deux manières de rentrer aux panthéons des jeux de rôle. La première consiste à pondre un jeu d’anthologie –Fallout, Baldur ou Morrowind- dont les joueurs se souviendront toute leur vie avec nostalgie. La deuxième, plus rare, consiste à commettre un tel navet que les imprécations des joueurs escroqués garantiront au développeur et au soft une notoriété immédiate.

Soyons clair, il semble fort que l’objectif de Crafty Game avec le Remake de Realms of Arkania HD ait été de commettre le jeu le plus buggé connu à ce jour. Une démarche saluée par de nombreux internautes aux moyens de tonitruants « Vous aurez des nouvelles de mon avocat !». Les gens sont méchants.

Alors, aux plus pressés d’entre vous, oui, ce jeu est une horreur. Ne l’achetez pas sauf pour votre ennemi. Et encore, si vous êtes cruel. Néanmoins, afin de rentabiliser les nombreuses heures pénibles de test, j’ai cependant décidé de chroniquer cette sortie.

Realms of Arkania HD exploration

Préambule

Nous sommes début Aout. Dans la torpeur de l’été et quelque peu affamé par une actualité vidéoludique faiblarde j’installe RoAHD. Ma démarche se soldera par une quantité effarante de crash de mon Windows avant de parvenir à une sorte de pièce mal texturée où rien n’est cliquable sauf un texte en allemand. Le communiqué du développeur est déjà tombé afin de s’excuser avec un argumentaire type « c’est la faute au stagiaire et la sortie a été poussée par le studio » digne de Gaston Lagaffe. Le porte-parole nous rassure. Lui-même ancien champion de Football américain (quand on s’en vante en tant que développeur c’est grave), il s’engage à faire des gros placages aux bugs avec un patch, non pas par semaine, mais par jour. J’abandonne RoAHD et joue à Shadowrun Returns.

Sprechen sie deutch Freund ?

Trois semaines plus tard je lance la version 1.21. L’écran est en Allemand. Il faut choisir dans les options la langue (pratique). Tient, ça ne marche pas. En fait il faut lancer le jeu en Allemand, démarrer une save, changer la langue et recharger la save.

RoAHD c’est un peu l’équivalent du jukebox de Fonzie dans Happy Days ou de la mobylette à Papy :  faut mettre un coup de pied dedans pour que ca démarre, sans pour autant être sûr que ça va marcher.

Realms of Arkania HD inventaireCommence alors la longue et laborieuse création de personnage. Après avoir attribué des scores aléatoires (sans possibilité de changer) aux caractéristiques (et dans l’ordre s’il vous plait) mes héros se trouvent affligés de pathologies mentales lourdes. En effet, les personnages disposent de handicaps sous formes de caractéristiques négatives. Ce qui serait une bonne idée, si votre équipe ne ressemblait pas au final à un commando échappé de l’asile de cleptomanes psychotiques agoraphobes claustros qui ont peur des morts vivants. Imaginez le seigneur des anneaux, et maintenant remplacez Gandalf par Rain Man. Les classes mêlent allègrement races et métiers. Ainsi votre Nain est un nain, pas un guerrier-nain et votre magicien se décline en sorcière au féminin car les femmes ne savent pas lire des grimoires, c’est bien connu. Il y a aussi le chasseur, le guerrier, le Druide, l’Elf machin truc (3 déclinaisons, il faut dire que l’absence de texte explicite n’incite pas à l’immersion), le genre de Nordique, le Voleur. Dans un ineffable instant de bonté, le manuel  m’explique les mécanismes du jeu genre « plus une caractéristique est haute, meilleure elle est » (re-sic). Et débrouillez-vous pour saisir les subtilités des 30 compétences, genre la différence entre acrobatie, équilibre corporel et alpinisme. Le manuel anglais est lui aussi, en Allemand par endroit.  Le temps de monter du niveau 0 à 1 et de distribuer des points dans les compétences (comment ça mon Nain est meilleur en connaissance des arcanes que mon magicien ?) et le prêtre du temple vous colle gentiment dehors sans vous filer la moindre quête. Sympa le mec.

L’aventure à 5 fps.

Realms of Arkania HD grisailleVisiblement avec mon quadruple core, j’ai été trop ambitieux de choisir du 1200-780 en qualité « moyenne ». Je me traîne dans la ville dont la modélisation n’est pas sans rappeler le fulgurant Quake 3. Le temps de changer la config/ recharger/repasser en anglais/recharger la sauvegarde et j’erre dans la ville comme ces PNJ amorphes auquel on ne peut pas parler. Retour au manuel qui m’explique que nan, en fait ils sont là pour l’ambiance mais ils ne servent à rien. Je rentre dans une taverne au hasard et c’est alors qu’apparaît la voix. Car oui, le jeu est doublé par un mec qui a l’air d’avoir une sinusite et les gonades dans une tenaille. Une voix insupportable, atroce. L’animation de la taverne est abominable, plutôt que de choisir une banale image les développeurs ont essayé (j’insiste sur ce mot) de modéliser une saynète pittoresque. Ainsi l’auberge est tenu par un clone de Jean-Pierre Bacri (toujours le même) qui regarde le plafond et le mur derrière lui tandis que ses deux servantes ressemblent à des lesbiennes qui s’embrassent dans le cou. A l’occasion, même en version anglaise on me lance un « Guten tag » suivit d’élucubrations en Allemands et il me faut répondre –en Allemand- dans la mesure du possible. Dans les magasins il faut 5 clics pour vendre un objet et il faut donc répéter l’opération un nombre colossal de fois pour vider son inventaire. S’en est trop pour mon processeur de portable qui surchauffe et plante lamentablement.

Ta quête pénible sera, jeune Padawan

Realms of Arkania HD souterrainsA force de zoner je tombe sur une rambarde d’un fort mal modélisé (contrepèterie) que je clique. Apparaît un texte (et mon animation pourrie alors ?) où on me file une quête. Il me faut retrouver l’épée bidule pour repousser une horde d’orcs. Original ça le coup de l’objet magique pour repousser une invasion. Juste à côté j’hérite d’une quête plus adaptée à mes maigres talents : vider la réserve des gardes de la bande de voleurs qui la squatte en me servant au passage. Me voilà dans le donj’. Zut, il fait noir. Ma sorcière essaye de lancer un sort de lumière. Qui foire. Au bout de 5 tentatives et d’une magicienne presque à bout de points de magie le sort marche. Le donjon est fort vide, de temps en temps un petit texte inepte m’explique ce qui se passe genre « vous sentez un lapin en train de cuire ». Puis c’est le combat.

Adrienne !

Realms of Arkania HD combatLa carte devient isométrique. Un voleur ennemi s’élance et commence à tourner en rond sur la carte sans s’arrêter. Ce qui, dans un jeu censément en tour par tour, est une prouesse. La magicienne foire son sort. Le nain loupe son coup. J’estime le nombre de coups qui touchent à un sur 6 ou 7. Mon Druide Panorameau ne connait que 3 sorts, tous inutiles. Un voleur tire une flèche qui traverse la carte pour se perdre dans l’espace infini, apparemment pour tenter de rejoindre la sonde Voyageur hors du système solaire. Je recharge. Finalement, le combat s’achève mais mon voleur est mort. Je sors acheter des torches (et une boite d’allumettes) et essayer de le ressusciter. Il faut pour se faire donner de l’argent et essayer de prier. Tout mon fric y passe mais le prêtre m’annonce l’heureux événement de sa résurrection. Problème : mon voleur, Pickpaul, est toujours raide. Me revoilà dans le Donjon avec Pickpaul deuxième du nom (un nouveau personnage). Celui-ci est promptement nettoyé en 2 heures à peine (pour 6 pièces, vu la lenteur des combats). Mais la torpeur provinciale de la ville me pèse, et il me faut prendre la route vers l’aventure, la vraie, en cliquant sur une borne, comme au bon vieux temps.

Voyage voyage ! Plus loin que la nuit et le jour !

Le voyage consiste à regarder un trait avancer lentement sur une carte. Fascinant. Régulièrement, on me demande si je souhaite repartir dans l’autre sens. Puis si je souhaite camper. L’animation du campement est accompagnée de nombreuses options : assigner des tours de garde, partir cueillir des plantes, panser les pieds puants du nain ou chasser. Dans la nuit,  une meute de loups m’attaque. Bien qu’ils soient capables de parer les coups de haches j’en triomphe aisément. Arrive alors le moment du Level-Up, celui du « je vais essayer de retoucher mes perso pour qu’ils ressemblent moins à ceux du Donjon de Naheulbeuk ». Hélas, mon Druide ne connait toujours que 3 sorts, mon nabot est toujours aussi naincompétent à la hache et ma sorcière aussi mauvaise. La répartition des points semble obéir à une logique propre mais obscure connue des développeurs seuls.

Trop c’est trop. Je vais de ce pas sur le forum de Crafty Games pour insulter le game designer et éventuellement le menacer de mort. Après, ça sera le tour du responsable qualité de STEAM, la plateforme en ligne fachisto-laxiste, pour lui suggérer où se mettre sa charte qualité.

Et là, je tombe sur cette brillante missive du staff qui se résume par « Pour le moment bande d’ingrats vous râlez devant notre super boulot et un jour vous serez en admiration devant notre chef-d’œuvre génial ».

En désinstallant le jeu, je pense à cette citation d’Erasme :
Le peuple entier te siffle; ce n'est rien, si tu t'applaudis, et seule la Folie t'y autorise.

 

 

Test par Ouil of ze be holder

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Graphismes et sons :  0/5
J’ai connu des jeux 16 bits meilleurs

Interface de combat : 1/5
Seuls les incurables masochistes s’amuseront de la souffrance que cette interface engendre

Scénario : 1/5
Une épée magique à retrouver ? Une invasion d’Orcs ? Avec une telle originalité ils devraient vendre le scénario à Hollywood pour faire Eragon 3.

Jouabilité (fun) : 0/5
No comment.

Note finale : 0/5
Optimiste, je voudrais pouvoir dire que ce jeu sera un jour un classique d’ici la sortie du patch 2.9 en 2015. Mais l’adulte en moi me rappelle que d’ici là il y aura Mass Effect, Dragon Age, et qu’on n’en aura plus rien à foutre.