Note : Ce mini-test du nouveau Shadowrun : Hong Kong nécessitera pour les lecteurs méconnaissant la série la lecture des tests de Shadowrun Returns, puis de Shadowrun Dragonfall pour un exposé plus complet du cadre de l’histoire et des mécaniques de jeux. Sinon vous ne comprendrez rien. Vous êtes prévenus.
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Shadowrun : Hong Kong
Hong Kong : ses vendeurs de Rolex contrefaites, son Chungqing mansion plein de dealers nigérians et de restos indiens, son escalator de 3 kilomètres du mid-level et le chant des cigales sur Victoria’s peak. Je connais bien Hong Kong pour avoir vécu près d’une demi-décennie en Asie et je vous assure que Shadowrun Hong Kong a aussi bien capté l’ambiance de l’ex cité-état que Taken 1 celle de la ville-lumière. Oui, c’est une boutade.
D’ailleurs les décors très « Blade Runners » de Seattle sont réutilisés. Shadowrun Hong Kong n’a non seulement pas capté l’identité unique de la ville, mais les choix esthétiques hurlent la paresse des développeurs.
Paresse, le mot est lâché : Shadowrun Hong Kong est un jeu paresseux, qui se repose sur ses lauriers plutôt que de faire ses devoirs à la maison. Et cette désinvolture suinte un tantinet trop du titre.
Au centre de Hong Kong, la Kowloon Walled City (suivez le lien, ça vaut le coup). Cette ville fortifiée de Kowloon a réellement existé à l’époque ancestrale du tout premier Shadowrun papier (1989) avant d’être rasée en 1993. Ce bidonville (un véritable coupe-gorge à l’époque où on allait acheter des secrets nucléaires et fumer de l’opium) a d’ailleurs inspiré plus que toute autre ville le courant Cyberpunk qui inspirera plus tard Cyberpunk (le jdr) puis Shadowrun (qui a introduit des éléments de Fantasy pour éviter de plagier Cyberpunk).
Dans ce Hong Kong futuriste et dystopique la citée infernale est de retour version 2.0 et elle sera au centre de l’intrigue. Votre personnage, un(e) gosse des rues de Seattle élevé(e) par un vieux monsieur chinois non pédophile, enquêtera sur la disparition de son bienfaiteur et mentor à HK. Oui, un peu comme dans Dead Man Switch, la campagne de Shadowrun Returns. Recherché, obligé de financer sa cavale en se livrant à l’insu de son plein gré à des Shadowruns, il découvrira un complot magico-corporatiste dont les implications menacent le monnnnnndeuh. Oui, un peu comme dans Dragonfall, la suite de SR : returns..
Paresseux on vous dit. Certains des éléments scénaristiques sentent un peu le réchauffé et le dirigisme du titre (avec ses quêtes très « fais ce qu’on te dit ») n’aide pas. La critique sur le dirigisme des deux titres est encore une fois d’actualité.
La fine équipe de cas sociaux façon Shadowrun
Pour ramener la baballe à ses commanditaires, le héros que vous créez sera flanqué d’un -exflic Orc un peu psychorigide, d’une shaman rat un peu clocharde, d’une decker naine un peu passe-partout, d’un Samourai un peu Goule, et d’un mécano-decker légèrement savant fou. Pour la première fois vous aurez votre mot à dire sur leur progression avec un arbre des compétences à deux branches et 5 « niveaux » de montée en puissance. Mais ils s’équipent eux-mêmes comme des grands. Si vous vouliez vous faire votre petite dream-team du Ghetto aux petits oignons et les équiper vous-même, c’est raté. Si il est possible de leur « prêter » votre matos, la disette budgétaire du jeu (vous serez globalement pauvre) devrait vous en dissuader vite. Quelques second couteaux sans background sont aussi dispos, mais comme ils coûtent des sous et sont moins bons vous risquez de ne pas les jouer.
Chaque membre de cette bande d’individus parfaitement fonctionnelle et bigarrée a sa petite histoire tordue qu’il ne manquera pas de vous raconter pendant ….
Des heures.
Car oui, Shadowrun Hong Kong est bavard. Je dirais même plus : verbeux. Des torrents de mots en texte qui vous prendront du temps à lire. Joie est de constater que cet aspect-là (sur ?)développé dans les autres titres est toujours présent. Vous pouvez bien sûr choisir de survoler, mais ça serait à mon avis louper un des attraits du titre qui contribue en bien à l’ambiance plus que les graphismes paresseux. Bref il y a à lire. Et c’est bon. On retrouve aussi le genre de Deep/Dark Web des hackers avec des prestations variables et des programmes auteurs de Haikus.
Une petite balade dans la matrice
Ce qui nous amène à la Matrice, seul aspect à avoir changé beaucoup. Désormais un mécanisme de stealth simple vous permettra de pratiquer la pénétration informatique en douceur sans alerter les systèmes experts et deckers du coin. C’était supportable pour moi qui voue une haine sans nom au stealth vidéo-ludique et considère qu’attendre 10 minutes qu’un vigil fasse sa ronde est affreusement ennuyeux. Un niveau global d’alerte représente votre degré de discrétion, et gare aux éléphants dans les magasins de porcelaines proverbiaux.
Un mini-jeu permet de hacker les nodes d’informations. Il est basé sur la mémoire, et je n’ai jamais réussi à en finir un seul (peut être que je suis bête ? Vous avez réussi vous ?). Heureusement on peut passer en force moyennant une hausse du niveau d’alerte.
Il aurait été possible de créer un système proche pour les mages et shamans se rendant dans le plan astral. Après tout, je n’ai jamais joué à un scénario sur table de Shadowrun qui ne passe pas par une reconnaissance magique. Mais comme c’était fatigant, les développeurs s’en sont dispensés. Ces grosses feignasses.
Le tout ne vous surprendra pas trop et se laisse quand même jouer agréablement bien qu’il soit un cran en dessous de Dragonfall sur presque tous les aspects. Pour une poignée de dollars et autant d’heures (12-15 en lisant tout) vous pourrez goûter à la version sauce d’huître de Shadowrun.
Essais sur la flemme dans le crowfunding
Ce test m’inspire en guise de conclusion une réflexion. Le crowfunding a, avec ce jeu, montré une de limite nouvelle et inattendue que tous les travailleurs indépendants à la maison (et les chômeurs) connaissent bien. A savoir, la difficulté pour certains individus de se dépasser, d’innover, ou tout simplement de s’impliquer par soi-même sans motivation extérieure (comprendre : un bon coup de pied au c.l). Un éditeur privé aurait sans doute motivé/menacé/baratiné tout ce petit monde pour faire un peu plus et mieux ; mais l’impression est que la licence est une rente et que finalement on ne change pas trop une recette qui gagne, quitte à se parodier un peu en bout de course.
J’avais terminé mes deux tests précédents en espérant une montée en puissance et à terme un genre de Baldur’s gate ou de Fallout Shadowrun ouvert, non dirigiste et riche.
Je sais aujourd’hui que c’était un vœu pieux, mais je me suis quand même amusé avec ce soft. À l’avenir je garderais mes folles espérances pour Pillar of Eternity 2.
Ouil, en direct de Kowloon Walled city
Notes
Graphismes & sons : 2/5
Aucun changement avec le premier tome. C’est un peu bédé et coloré, parfois mignon, parfois un peu illisible. J’enlève un point à cause de la décote car c’est trop 2013.
Interface de combat : 4/5
Du tour par tour classique avec nouveaux sorts, armes et drones. Le choix de cyber a été vraiment accru. Le jeux est plus facile.
Scénario : 3/5
Non franchement les textes sont bons, mais l’histoire traine, et les sous-intrigues des missions sont peu palpitantes. Le soft essaie d’orientaliser le tout mais c’est trop Jacques Burton dans les griffes du Mandarin et pas assez asiatique.
Jouabilité (fun) : 5/5
Pas mal, moins buggé en tout cas. Peut-être trop facile. Les changements dans la matrice sont bienvenus.
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